Serge Molla ouvre la réception du Jury œcuménique par Mr le maire David Lisnard à l’Hôtel de Ville par ces quelques mots :
Monsieur le maire, Mesdames et Messieurs les élus,
Je tiens avant tout à vous remercier chaleureusement d’accueillir comme chaque année le Jury œcuménique en votre mairie, et je le fais au nom des deux associations internationales, à savoir SIGNIS, l’Association catholique mondiale pour la communication, et INTERFILM, l’organisation protestante internationale de cinéma.
Vous le savez, le Jury œcuménique, fête cette année son 50e anniversaire. Il a pour vocation d’être attentif à l’humain et à sa dimension spirituelle, ce qui explique pourquoi au cœur des films les visages retiennent tant l’attention de nos jurys depuis des années. Ne dit-on pas volontiers qu’il est fenêtre de l’âme ? Il n’est qu’à songer par exemple au film magnifique Paris,Texas, restauré et présenté à Cannes Classics, film de Wim Wenders qui recevra samedi prochain le prix spécial 50 ans du Jury œcuménique.
S’il y a quantité de gens, il y a encore beaucoup plus de visages, notait Rilke, car chacun a en plusieurs. Pourtant le visage se dérobe tout autant qu’il se livre. C’est dire qu’il fait écran. Il tend un piège dans lequel on tombe si on manque d’attention et alors on dévisage, c’est-à-dire qu’on endommage autrui de son regard. Mais le visage traduit en même temps l’identité profonde de l’autre, qui s’il est vraiment regardé, permet d’envisager une véritable rencontre.
Or le regard suppose de la lumière, ce que tout cinéaste et chef opérateur de talent sait bien. C’est pourquoi leurs œuvres « ne rendent pas le visible, mais elles rendent visible », selon la belle formule du peintre suisse Paul Klee. Le regard porté par le cinéaste devient ainsi analogue à celui de l’artiste qui avait sculpté un cheval dans la pierre et qu’interroge un enfant : « Comment as-tu su qu’il y avait un cheval dans la pierre ? »
Autant dire que les grands cinéastes primés par le Jury œcuménique sont de ceux qui renouvellent notre regard. Ils nous apprennent à moins dévisager autrui qu’ils n’invitent à la rencontre de visage à visage. Et d’ailleurs Judith Godrèche l’a rappelé avec force avec son court-métrage Moi aussi sur tant de femmes auxquelles elle rend un visage, une dignité, court-métrage aussi nécessaire qu’important. C’est dire en un mot que les cinéastes nous invitent à regarder, c’est-à-dire à garder deux fois : une fois par les yeux, la seconde par le cœur.
Alors merci Monsieur le Maire, de permettre chaque année au Jury œcuménique non seulement d’envisager peut-être une véritable rencontre avec vous, mais de la vivre. De tout cœur, merci.
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