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Portrait du juré Xavier Accart (France)

Portrait du juré Xavier Accart (France)

Journaliste pour l’hebdomadaire chrétien d’actualité La Vie, puis rédacteur en chef du mensuel de spiritualité Prier (groupe Le Monde), diplômé de Sciences-Po Aix et de l’EPHE où il a obtenu un doctorat en sciences religieuses. Il est membre du bureau de la Fédération des Médias Catholiques (FMC), auquel appartient SIGNIS-Cinéma.

Comment abordez-vous ce Jury œcuménique à Cannes ? Quelles sont vos attentes, espérances ?

Je suis impatient de découvrir tant d’œuvres de grands réalisateurs (la sélection est particulièrement alléchante me semble-t-il) et heureux également de me préparer à échanger avec des chrétiens passionnés par le 7e art. J’espère qu’ils m’ouvriront les yeux sur des choses que je n’avais pas vu ou compris.
Comment le cinéma est entré dans votre vie ?
Très jeune, je restais tard le soir – bien au-delà de l’heure autorisé ! - pour regarder des films diffusés dans le cadre de la dernière séance avec mon père. Je me souviens aussi l’été de projections en plein air des films de Pagnol sur le parking du village que j’habitais dans le midi.

Quels sont les 3 films majeurs pour vous personnellement ?

Difficile de faire un choix si drastique. Les films qui se présentent à mon esprit sont :
 Andrei Roublev de Tarkovski : je ne me lasse pas de contempler ce film comme on contemplerait une icône. L’équilibre entre narration et poésie y est atteint à la différence d’autres films fascinants du même réalisateur. La photo est merveilleuse.
 Le Journal d’un curé de Campagne de Bresson : je trouve que le réalisateur français sert admirablement le texte de Bernanos. Ce film me bouleverse.
 Departure de Yōjirō Takita. Ce n’est probablement pas un des plus grands films de l’histoire du cinéma. Mais il me touche profondément. Après l’avoir vu, je suis resté sans voix pendant plusieurs jours.

De même, avez-vous un(e) réalisateur(rice) « coup de cœur » ?

J’aime beaucoup les derniers films d’Eugène Green : La religieuse portugaise, la Sapienza, le fils de Joseph. Ce sont des films à la fois profonds et plein de légèreté et de beauté. Et puis comme Takita ou Kore-Eda, il y est toujours question de la famille, un thème profond s’il en est comme nous le montre les tragédies grecques, comme l’illustre aussi un roman qui m’est cher et que je viens de publier Le Dormant d’Ephèse.

Pour vous, comment définiriez-vous un bon film ?

Un film qui, par l’alliance du fond et de la forme, parvient à nous ouvrir à des dimensions de la réalité auxquelles nous étions fermés ou endormis.
De quelle façon abordez-vous la question « spirituelle » ou « chrétienne » dans votre rapport au cinéma ?
C’est une vaste question. Pour qu’il ait une valeur chrétienne ou spirituelle, un film doit confronter à la réalité (du monde et du sens profond de la vie) pour qu’on en sorte avec le désir renouvelé de bien vivre et d’aimer. Bien-sûr c’est important de nous faire prendre conscience de la souffrance d’une catégorie d’être, mais ce qui est crucial c’est de nous conduire à une conversion du regard, du coeur. J’aime ces films qui nous donnent envie, quand la lumière se rallume, d’appeler des personnes avec lesquelles nous étions brouillées, de renoncer à de vaines ambitions ou de dire à nos proches combien nous les aimons.
Autre chose ?...
J’aime aussi beaucoup le cinéma asiatique classique pour le rapport au temps dans lequel il nous introduit, le Kurosawa des 7 Samouraï ou les films de Satyajit Ray. Il nous libère de la dictature du zapping, de la vitesse, de la destruction de la capacité d’attention sans laquelle il n’est nulle prière.


Journalist for the Christian weekly La Vie, and chief editor of the monthly Prier (group Le Monde), has graduated of the Political Sciences Institute of Aix-en-Provence and has accomplished a doctorate in religious sciences. He is a member of the office of the Fédération des Médias Catholiques (FMC) to which belongs SIGNIS-Cinéma.

How do you approach this Ecumenical Jury in Cannes ? What are your expectations, hopes and expectations ?

I look forward to discovering so many works by great directors (the selection is particularly appealing to me) and also happy to prepare myself to share with Christians who are passionate about the 7th art. I hope they will open my eyes to things I hadn’t seen or understood.
How did cinema get into your life ?
At a very young age, I stayed late at night - well beyond the time allowed ! - to watch movies from the last session with my father. I also remember the summer of outdoor screenings of Pagnol’s films on the parking lot of the village where I lived in the south.

What are the 3 major films for you ?

It’s hard to make such a drastic choice. The films that come to my mind are :
 Andrei Roublev from Tarkovski : I never tire of contemplating this film as one would contemplate an icon. The balance between narrative and poetry is achieved, unlike other fascinating films by the same director. The picture is wonderful.
 Le Journal d’un curé de Campagne de Bresson : I find that the French director admirably serves Bernanos’ text. This film upsets me.
 Departure Yōjirō Takita. It’s probably not one of the greatest films in the history of cinema. But it touches me deeply. After seeing him, I was speechless for several days.

Similarly, do you have a "favorite" director ?

I really like Eugene Green’s latest films : La religieuse portugaise, la Sapienza, le fils de Joseph. These are films that are both deep and full of lightness and beauty. And then, like Takita or Kore-Eda, there is always a question of the family, a deep theme if ever there was one, as shown by the Greek tragedies, as also illustrated by a novel that is dear to me and that I have just published Le Dormant d’Ephèse.

What do you think a good film is ?

A film that, by combining content and form, manages to open us to dimensions of reality to which we were closed or asleep.
How do you approach the "spiritual" or "Christian" dimension in your relationship with cinema ?
It’s a big question. For a film to have a Christian or spiritual value, it must confront the reality (of the world and the deep meaning of life) so that we emerge with a renewed desire to live well and love. Of course it is important to make us aware of the suffering of a category of being, but what is crucial is to lead us to a conversion of the gaze, of the heart. I like these films that make us want, when the light comes on again, to call people with whom we were at odds, to give up vain ambitions or to tell our loved ones how much we love them.
A last word...
I also like classical Asian cinema very much for the relationship to the time in which it introduces us, the Kurosawa of the 7 Samurai or the films of Satyajit Ray. It frees us from the dictatorship of zapping, from the speed, from the destruction of the capacity for attention without which there is no prayer.