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L’Amour et les Forêts

Cannes Première
L'amour et les forêts

Nationalité : France
Genre : Thriller, Drame
Durée : 1h 45min
Date de sortie : 24 mai 2023 en salle
Réalisateur : Valérie Donzelli
Acteurs principaux : Virginie Efira, Melvil Poupaud, Dominique Reymond

Quand Blanche croise le chemin de Gregoire, elle pense rencontrer celui qu’elle cherche. Les liens qui les unissent se tissent rapidement et leur histoire se construit dans l’emportement. Le couple déménage, Blanche s’éloigne de sa famille, de sa sœur jumelle, s’ouvre à une nouvelle vie. Mais fil après fil, elle se retrouve sous l’emprise d’un homme possessif et dangereux.


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

Elle, c’est Virginie Efira, l’actrice française que tout le monde s’arrache. Lui, c’est Melvil Poupaud, l’acteur beau gosse qui fait trembler les filles.
Mais ici... Elle et Lui vont s’arracher et nous faire trembler.
Blanche est face à Lamoureux – deux noms prédisposés à une idylle pure et parfaite. Mais pourtant, tout bascule, car ce fameux Grégoire Lamoureux prend l’amour à bras-le-corps et Blanche se retrouve dans une relation à corps perdu. Il l’étouffe et la malmène dans leur grande maison où vivent également leurs deux beaux enfants. Tout semblait parfait pour cette famille tirée à quatre épingles, mais pourtant il va tout faire pour la tirer vers le bas...
« Tu ne dois vraiment pas m’aimer beaucoup pour me laisser devenir ce monstre » s’exclame le mari conscient – mais très culpabilisateur, de son état qui vrille au fur à mesure que le film avance...
L’interprétation des comédiens est troublante et criante de vérité dans ce jeu du chat et de la souris machiavélique. Grâce à sa mise en scène au plus près des personnages et à une direction d’acteurs parfaite, Valérie Donzelli est divinement parvenue à rendre compte d’une réalité malheureusement trop présente dans les relations : les pervers narcissiques...


De l’emprise dans le couple. Le sujet du film de Valérie Donzelli a de quoi faire hésiter. Néanmoins, dès les premiers plans, le témoignage rétrospectif de Blanche (Virginie Efira), face caméra, nous soulage (si elle raconte, c’est qu’elle en sort). Il appelle également notre regard à venir disséquer le comportement du mari – Melvil Poupaud, ici Grégoire Lamoureux, tout un programme ! Le jeu de l’oie de la perversité se révèle case par case : dire ou citer le figuré pour signifier le propre « j’aimais jusqu’à ses pleurs que je faisais couler », mentir, isoler sa proie, surjouer le remords, ’fliquer’ (l’emploi du temps, l’argent), harceler au téléphone, suivre, dévaloriser, retourner les torts « si t’avais un petit peu d’amour pour moi, tu m’aurais jamais laissé te traiter comme ça ». Et, logiquement, quand le jaloux provoque ce qu’il craint le plus, il passe au stade supérieur de la persécution.
En quittant la mer pour les forêts de l’Est (et sa jumelle Rose, dont les épines auraient été bien utiles), Blanche passe du clair au sombre, comme la photo du film. Mais la forêt n’abrite pas que le loup, elle fournit aussi l’oxygène qui permet de revenir à soi. Les deux interprètes sont très justes dans une riche palette d’émotions.


Les plans sont larges et les prises de vue du bord de mer, en Normandie, sont idylliques. De même la rencontre entre les protagonistes. Mais un déménagement et la naissance de deux enfants concourent à l’isolement de l’épouse. Insensiblement ce couple de rêve « sur le papier » part à la dérive. La jalousie et la possessivité mènent le mari sur la pente de la perversité, sous couvert du modèle idéal qu’il perpétue. Irréprochable auprès de ses enfants et de son employeur, il ne perd pas une miette des activités de son épouse. Il maintient sur elle une pression insupportable : critique voire violent à l’intérieur de leur domicile, mais toujours charmant en présence de tiers. La mis en scène est tirée au cordeau et la performance des acteurs est tout à fait remarquable. Lui passe du plus grand sourire à un regard implacable. Elle, sans se départir de son charme naturel, joue d’un regard de bête traquée. Elle semble engluée dans ce simulacre de couple idéal et tardera à réagir.
Enfin, des flash-back nous donnent une idée de l’issue qui sera donnée à ce drame intime dont la construction nous aura maintenus en haleine jusqu’au dénouement.