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Moolaade

Moolaade

Film sénégalais (2002).
Drame.
Durée : 1h 40mn.
Date de sortie : Prochainement
Réalisé par Ousmane Sembene

Le troisième volet d’une fresque africaine, consacré à la femme africaine et l’excision.


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

Remarquable femme cette Colle Ardo, héroïne de MOOLAADE. Dans un village beau comme sur une carte postale tout semble paisible. Soudain quatre fillettes surgissent pour demander asile (sens du mot Moolaade) chez Colle Ardo. Elles fuient pour "ne pas être coupées". Colle Ardo va s’opposer à leur excision. Pour cela elle défie l’autotité des salindalas(exciseuses professionnelles)et le conseil des chefs du village. Alors, devant tout le village, elle essuie les coups de fouets. Mais sa détermination et son inflexibilité, si elles suscitent la fureur de tous ceux qui sont attachés aux traditions ancestrales, provoquent une prise de conscience au sein du groupe des femmes.
Malgré une interprétation parfois théatrale, l’intérêt et la qualité de ce film sont à mon avis indéniables :
-j’ai aimé l’expression de cette fragilité de la force et de cette force de la fragilité ;
-j’ai été sensible à la signification des lieux(village,maison et sa cour intérieur, vers le "mercenaire", la place du conseil,la mosquée,le puits) ; ils sont lieux d’enjeux où se vit un jeu de "je-tu-il" déterminant.
-j’ai admiré les visages ;ils sont magnifiques. Exposés,menacés...chacun d’eux, que ce soit ceux d’ainés ou d’enfants,de femmes ou d’enfants,est porteur d’une parole et d’une foi.

enfin, et si la portée de Moolaade avait valeur universelle ?


Cette histoire qui se présente comme contemporaine emprunte des formes anciennes de narration. C’est un conte, un beau conte même si la mort y est présente. Cette forme narrative permettra au film, du moins on l’espère, d’atteindre une très large public, en Afrique et ailleurs. Car c’est en même temps un film militant contre l’excision et, d’une manière plus générale, contre la soumission totale des femmes aux hommes dans la pesanteur de la tradition. Il est intéressant que ce soit un africain qui ait réalisé ce film car il manifeste que cette cause n’est pas uniquement prise en charge par les femmes. Il est intéressant aussi de voir souligner le rôle éminent joué par les médias audio-visuels dans la découverte des idées modernes rendant possible la rébellion des femmes contre la tradition. Ici, ce ne sont pas des livres que brûlent les forces de la réaction, mais, des transistors... Le film ne vaut pas seulement par les idées défendues mais aussi par sa dramaturgie et par sa galerie de portraits hauts en couleur. L’Afrique paysanne est bien présente dans l’image et le son. La musique y joue un rôle trés important. Le conflit entre tradition et modernité est incarné par Collé, la mère qui, la première, a refusé que sa fille soit excisée, mais aussi par le fils du chef du village qui travaille en France et revient au village pour prendre femme. C’est lui qui imposera finalement à son père sa fiancée non excisée et... installera une antenne de télévision en rivale du minaret de la mosquée.
Un trés grand film.