Les films à Cannes ont tous un rôle social, économique, politique et spirituel. Le festival est un moment essentiel dans la vie d’un cinéphile. Bien sûr Cannes permet de voir des films et de découvrir des œuvres rares mais Cannes est avant tout un rassemblement humain. Un magnifique observatoire de la condition humaine, capable du pire des comportements comme du meilleur. Pour M. Lisnard, premier adjoint au maire et président du palais, qui ne manie pas langue de bois, « la logistique est de plus en plus difficile, contraignante car certains individus utilisent le festival pour des raisons déplacées. A force d’euphorie médiatique et de performances de travail, on en oublie tout simplement ….d’aimer les gens ! » Le jury peut avoir cette vocation à être un complément d’âme, d’être en prise avec la réalité au sein d’un univers qui souvent évolue dans le virtuel. La portée d’une œuvre cinématographique dépend non pas de valeurs posées en soi ou d’idées théoriques mais de notre façon de regarder, avec notre personnalité, notre éducation et notre culture. Simplement avec ce que nous sommes.
Qu’en pense le jury ? Lors d’une célébration oecuménique organisée aujourd’hui, les jurés ont témoigné de leur passion pour le cinéma et de la place qu’il occupe dans leur vie de croyant. Une journée à part donc, moins marquée par les films, plus tournée vers l’intériorité et la réflexion.
Une fois encore on a pu vérifier la pertinence des propos et la qualité de présence de ce jury au sein du festival. Margrit Frolich (Allemagne), tout en finesse, commente : « Le cinéma touche à nos sens et nous aide à comprendre le monde mais aussi l’autre monde. Quand je parle de l’ « autre monde » je parle des autres pays, des autres modèles d’existence, des autres vérités que la mienne… ». Lukas Jirsa (Rep. Tchèque) souligne lui que les films sont très importants car « ils font partie des médias qui possèdent un grand pouvoir. Les films sont des paraboles pour notre temps ». Il poursuit en expliquant : « je cherche des films diamants, exceptionnels, capables de montrer une condition humaine et de faire connaître autrui dans le monde contemporain ». Venus d’autres continents Marie-Thérèse du Liban et Alyda Faber du Canada posent un autre regard sur le cinéma. Marie-Thérèse travaille dans le milieu des médias. Pour elle le cinéma est une manière de « raconter des histoires », de parler des problèmes qu’il y a dans son pays, la guerre, les familles déchirées. Comblée d’être à Cannes comme juré, elle tient à préciser que la place de ce jury est essentielle dans « un univers matérialiste qui communique beaucoup d’idées parfois loin des valeurs humaines ». Alyda s’attache plutôt à la dimension éthique liée au cinéma puisqu’elle travaille cette question depuis de nombreuses années. Comment l’éthique peut-elle améliorer l’esthétique et le cinéma ? « Les films remettent en question notre capacité à regarder et notre humanité quand ils évoquent des sujets loin de nos horizons. Souvent le cinéma est un révélateur social » Enfin pour la France, Joel Baumann, pasteur, parle de l’image « à la fois dangereuse et source de vérité. Il faut apprendre à lire les images » souligne t-il. « Entre un écran et la réalité, il y a ce passage à effectuer qui est parfois délicat pour le spectateur ». René Aucourt le président du jury termine en évoquant les nombreux thèmes sociaux et politiques abordés dans les films. « Les chrétiens ne sont pas étrangers au monde du cinéma et au septième art. Nous partageons cela avec les autres dans la société d’aujourd’hui ».
A 17h00 la journée n’est pas finie. Il reste en effet à voir l’unique film en compétition du jour, et non des moindres, le Che de Steven Soderbergh, qui dure 4h30 ! Attention interdit de s’endormir…