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Promis le ciel

Un Certain Regard
Promis le ciel

Nationalité : France, Tunisie, Qatar
Genre : Comédie dramatique
Durée : 1h 35min
Date de sortie : Prochainement
Réalisateur : Erige Sehiri
Acteurs principaux : Aïssa Maïga, Laetitia Ky, Mohamed Grayaa

Marie, pasteure ivoirienne et ancienne journaliste, vit à Tunis. Elle héberge Naney, une jeune mère en quête d’un avenir meilleur, et Jolie, une étudiante déterminée qui porte les espoirs de sa famille restée au pays. Quand les trois femmes recueillent Kenza, 4 ans, rescapée d’un naufrage, leur refuge se transforme en famille recomposée tendre mais intranquille dans un climat social de plus en plus préoccupant.


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

C’est à Tunis que vivent sous le même toit trois femmes d’origine ivoirienne. Marie, journaliste et pasteure, héberge Naney qui a quitté sa fille et attend des papiers dans l’espoir d’une vie meilleure et Jolie, jeune étudiante qui porte bien son nom. Elles sont lumineuses et généreuses et forment ainsi un trio détonnant, riche d’ingéniosité et de petites combines, d’humour et d’entraide.
La maison est aussi lieu de prêche, où toute la petite communauté colorée se soutient, prie, danse et chante. Lorsqu’arrive la petite Kenza rescapée d’un naufrage, ses seuls mots "tout est cassé" raisonnent comme un écho prémonitoire. Leur situation précaire et les liens tissés se délitent petit à petit . Chacune se voit renvoyée à ses propres fractures.

A travers l’histoire de ces trois femmes, le message du film est éminemment politique. La réalisatrice franco-tunisienne nous livre ici une version très dure des conditions de vie et de la répression que subissent en Tunisie les subsahariens.


Un moment de douceur et de complicité débute le film entre trois femmes d’Afrique noire, entourant une petite fille dans son bain, Kenza, rescapée, qu’elles ont recueillie. Le caractère et le milieu dont elles viennent sont différents. Nous les découvrons dans des fragments de vie. L’une est pasteure, Marie, et soutient une communauté ; une autre, Naney, dont l’enfant est resté dans son pays d’origine, survit grâce à des combines ; la plus jeune, Jolie, est étudiante. En Tunisie où elles ont émigré, la situation envers les subsahariens devient préoccupante. Chacune va réagir à sa manière. Quelques scènes sont très belles : la relation entre Marie et un ami aveugle, les scènes de prière et de chants dans une église improvisée, la joie de vivre de la petite Kenza. La lumière a son importance : est-on entre la clarté ou l’obscurité ? Et la couleur bleue, emblématique de l’architecture tunisienne, domine ce film. Ce film sur l’exil, plein de poésie et d’humanité, dont le rythme est soutenu, évoque une réalité qu’on ne peut ignorer. Promis le ciel est le refrain de la chanson du groupe Delgres « On m’a promis le ciel, en attendant j’ suis sur la terre à ramer ».


Trois femmes que rien ne prédisposait à vivre ensemble. Elles sont habitées par la soif de reconstruire leur vie : l’une anime la petite communauté évangélique qu’elle a établie ici à Tunis, la seconde vit de petits trafics pour pouvoir partir en Amérique, la troisième est soutenue par sa famille et veut finir ses études.
L’arrivée de la petite Kenza est un choc : "Le bateau s’est renversé !" et les bouscule : sa présence est un risque autant qu’un réconfort affectif pour toutes les trois. Et Marie doit alors se remettre en cause. Dans son rôle de pasteure, le temporel domine son for intérieur. Elle est sans pitié pour Naney, à contresens du message évangélique qu’elle délivre à ses ouailles. Veut-elle s’occuper de Kenza pour elle-même ou pour le bien de l’enfant ?
« On m’a promis le ciel et en attendant, je suis sur la terre à ramer » dit la chanson de clôture. C’est donc un film doux-amer, contrebalancé par la vitalité des trois actrices et des dialogues pleins de fraîcheur. Elles sont surprenantes, drôles souvent. C’est l’Afrique à Tunis, un moment de cinéma dépaysant, un film qui décentre notre regard sur les migrations : la présence de communautés étrangères peu intégrées n’est pas l’apanage de l’Europe !