
Nationalité : France, U.S.A.
Genre : Documentaire
Durée : 1h59
Date de sortie : Prochainement
Réalisateur : Raoul Peck
Acteurs principaux :
1949. George Orwell termine ce qui sera son dernier mais plus important roman, 1984.
ORWELL : 2+2=5 plonge dans les derniers mois de la vie d’Orwell et dans son œuvre visionnaire pour explorer les racines des concepts troublants qu’il a révélés au monde dans son chef-d’œuvre dystopique : le double discours, le crime par la pensée, la novlangue, le spectre omniprésent de Big Brother… des vérités sociopolitiques qui résonnent encore plus puissamment aujourd’hui.
(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)
19 mai 2025
Les auteurs de science-fiction ont toujours été des lanceurs d’alerte qui avertissent des dérives possibles et George Orwell en est l’un des précurseurs. Dans son œuvre majeure, la dernière, "1984", il est plus que visionnaire : il est prophétique. Ce documentaire relate les grands moments de sa vie, notamment quand il est policier de Sa majesté en Inde, qui l’ont amené à dénoncer les totalitarismes et leurs mensonges. Passionnant.
Passé, présent et futur s’entrecroisent. Le montage intercale des scènes des films tirés de son roman dystopique, des images d’archives et des actualités, guerres, autodafés et discours politiques, pour exprimer le parallèle entre les deux. Tant d’horreurs commises au nom d’une idéologie, c’est parfois insoutenable. Comment les êtres humains peuvent-ils faire autant souffrir ? Cela reste un grand mystère... Orwell avait envisagé dès 1946 un état despotique utilisant une machine pour surveiller les gens : Big Brother que le réalisateur, Raoul Peck, assimile aux GAFA, les géants de la tech. Il avait également inventé un mot, novlangue, pour nommer la langue de bois des dirigeants qui étouffent la vérité.
Quel courage de faire un tel film ! On ne pourra pas dire qu’on ne savait pas...
22 mai 2025
George Orwell était-il visionnaire ? À en croire ses récits, il avait fort bien analysé les mécanismes mis en place par les régimes totalitaires pour arriver au pouvoir et s’y maintenir. Le documentariste américain Raoul Peck a construit son film en alternant des extraits de films en lien avec l’écrivain et des images d’actualités. Il déroule son propos en exploitant les thèses développées dans 1984 notamment et leur acuité est bluffante.
Les écrits d’Orwell, lus par l’acteur britannique Damian Lewis, raisonnent terriblement fort aujourd’hui. Le parallèle est criant entre la montée du fascisme à partir des années 1930 et le retour du populisme presque cent ans plus tard.
Les lettres adressées à ses amis juste après la guerre, alors qu’il était très malade, révèlent un homme conscient de sa position sociale et de son rôle dans les rouages du colonialisme britannique. C’est justement parce qu’il était au cœur même du système oppresseur qu’il peut en démonter toute la mécanique qui soumet les gens jusqu’à l’absurde, reflété dans le titre du documentaire.
George Orwell n’est pourtant pas pessimiste et croit au sursaut de la société civile, qui hier comme aujourd’hui, espérons-le, a toujours su se révolter et chasser les tyrans. Orwell 2+2=5 finit sur ce constat plutôt rassurant pour l’humanité toute entière.
20 mai 2025
Quelle heureuse idée de se référer à George Orwell en ces contextes géopolitiques menacés ! De même, pour contrecarrer la pratique du mensonge qu’il dénonçait dans son livre (1984), quoi de plus pertinent que de s’appuyer sur son carnet intime ?
Opter pour une voix off à l’adresse du spectateur, qui le renseigne sur les jalons de la biographie de l’écrivain, appuie la légitimité des propos du film en faisant de G. Orwell notre véritable contemporain : c’est alors qu’est sous-jacente la question des "fake news".
Monter le film en alternant des extraits de films (dont celui adapté du roman), en lien avec les thèmes développés (théorie du bouc émissaire, dialectique rodée du populisme) pour étayer la logique de dénonciation et décortiquer le processus de montée de l’autocratie, relève d’une honnêteté intellectuelle plus vraiment usitée. Enfin, l’illustrer par des images d’archives d’anciens ou de récents conflits, contribue à faire de ce film-docu un plaidoyer autrement plus efficace que des informations télévisées.
Tous ces ingrédients techniques pour rendre compte de propos visionnaires rédigés en 1949, a des chances de nous toucher au plus profond de notre être, quitte à nous bouleverser pendant longtemps.