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Le procès Goldman

Quinzaine des Cinéastes
Le procès Goldman

Nationalité : France
Genre : Drame, Policier
Durée : 1h 55min
Date de sortie : 27 septembre 2023
Réalisateur : Cédric Kahn
Acteurs principaux : Arieh Worthalter, Arthur Harari, Jeremy Lewin

En novembre 1975, débute le deuxième procès de Pierre Goldman, militant d’extrême gauche, condamné en première instance à la réclusion criminelle à perpétuité pour quatre braquages à main armée, dont un ayant entraîné la mort de deux pharmaciennes. Il clame son innocence dans cette dernière affaire et devient en quelques semaines l’icône de la gauche intellectuelle. Georges Kiejman, jeune avocat, assure sa défense. Mais très vite, leurs rapports se tendent. Goldman, insaisissable et provocateur, risque la peine capitale et rend l’issue du procès incertaine.

Ce film est présenté en ouverture à la Quinzaine des Cinéastes au Festival de Cannes 2023


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

Sous forme d’un huis clos dans la salle de cour d’assises d’Amiens, Le procès Goldman est traversé de bout en bout par une ambiance survoltée. Insatisfait dans ses rêves de militant engagé, devenu simple bandit en colère contre tout et tous – sauf ceux qui le soutiennent bruyamment dans le prétoire, Pierre Goldman est aussi violent en paroles que dans ses crimes. Le caractère politique du procès est ardemment souligné, Cédric Kahn a ici imbriqué avec brio les questions sociales de l’époque, le problème de la violence d’extrême gauche, la question du sort des juifs dans l’après-guerre.
Le film met à l’épreuve la recherche de vérité en l’absence de preuve formelle. Que vaut la parole des témoins ? La bonne foi n’est pas synonyme de vérité. Et d’ailleurs qui est de bonne foi ? C’est alors que la figure des avocats est déterminante : celui des parties civiles, ici diabolique à souhait, celui de la défense, assurée ici par Georges Kiejman moins passionnée mais essentielle pour démêler le vrai du faux.
Un film dense en paroles, passionnant.


C’est à la lecture du livre Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France , écrit par Pierre Goldman (demi-frère de Jean-Jacques Goldman) durant sa détention en prison, qu’est né chez Cédric Kahn le désir de réaliser son film. Il a choisi de reprendre en huis clos le second procès de cet homme qui s’est tenu à Amiens en 1976, avec un scénario très écrit.
Les gros plans sur le visage dur, fermé, de l’accusé, admirablement joué par Arieh Worthalter nous traduisent la personnalité complexe du personnage : à la fois braqueur violent condamné à la prison, radical, intellectuel militant d’extrême gauche. Son procès très médiatisé divise l’opinion publique. Son livre traduit surtout sa hantise de son origine juive polonaise, issue de la Shoah. Il entretient avec son avocat Georges Kiejman, également juif polonais, une relation compliquée.
Les plans restent fixes, les mots fusent et marquent l’extrême tension du moment. Durant ce procès, théâtre d’affrontements violents et de chahuts, Cédric Kahn a souhaité faire place à la parole. A la barre où se succèdent les témoins, fébriles. Dans les plaidoiries incisives des avocats, dignes des plus grands procès. Dans la déposition des policiers mis en cause. Dans le doute, ne reste que notre intime conviction.
NB : L’avocat Georges Kiejman est décédé le 6 mai et n’a pas vu le film.


Qui était Pierre Goldman, pour avoir autant défrayé la chronique ? Une forte tête, un militant intellectuel d’extrême gauche, un juif maudit ? un juif résilient ? un braqueur, un écrivain ? Il semble avoir mené plusieurs vies marquées par l’affrontement et la violence. La droite le considérait comme un braqueur de banques et un assassin, la gauche, notamment l’intelligentsia de Sartre à Signoret, lui octroyait des circonstances atténuantes.
25 ans après son mystérieux assassinat, Cédric Kahn restitue cette époque à travers la trajectoire de cet homme et à travers un huis clos judiciaire, avec une mise en scène sobre. Cette œuvre intense épouse le point de vue des avocats et se situe du côté de la défense, afin de mettre le spectateur dans la position d’un juré. La judéité et l’antisémitisme sont au cœur de ce film. Le réalisateur s’inscrit dans le genre du film de procès par une évocation libre et fort bien documentée qui est aujourd’hui toujours brûlant d’actualité : le rôle de la police dans une démocratie, la violence légitime, la violence légale, la radicalité militante.