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Girl

Un certain regard
Girl

Nationalité : Belgique
Genre : Drame
Durée : 1h45
Date de sortie : 2018
Réalisateur : Lukas Dhont
Acteurs principaux : Victor Polster, Arieh Worthalter, Valentijn Dhaenens, Katelijne Damen

Lara, 15 ans, rêve de devenir danseuse étoile. Avec le soutien de son père, elle se lance à corps perdu dans cette quête d’absolu. Mais ce corps ne se plie pas si facilement à la discipline que lui impose Lara, car celle-ci est née garçon.


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

Le film s’ouvre sur une scène douce en famille. La vie de Lara (née Victor) s’organise en deux mondes, celui du cercle familial aimant et celui de l’univers hostile des relations avec l’extérieur. On vit tout au long du film au côté de la jeune fille ; les plans répétés la montrant devant son miroir nous donnent des repères temporels sur les jours qui passent et nous font réaliser l’impossibilité pour un être humain de se sentir sain d’esprit dans une enveloppe corporelle qui le dégoûte. La danse tient une place importante, filmée avec dynamisme, pourtant, elle n’apparaît pas comme une source de plaisir ni de confiance en soi ; elle se fait sans musique. Pour le corps de Lara, ce n’est que la souffrance d’un travail intensif de ballerine non adapté à une physionomie masculine. Pour laisser place à Lara, il faut laisser mourir Victor.
Ce film est marquant par son rapport au corps et de part la justesse de ce tableau qui traite d’une période initiatique dans la vie d’une « Girl ».


Le défi que se lance ce héros n’est pas seulement de s’autoriser à être « elle-même ». Il veut également être reconnu et bien sûr aimé. Dans ce parcours semé d’embûches (dont certaines sont impossibles à anticiper) il lui faut composer avec sa virilité si encombrante. C’est avec beaucoup de pudeur que l’on nous montre que la moindre des fonctions triviales est source de difficultés (boire et/ou uriner). La caméra est tour à tour d’une délicatesse infinie ou bien survoltée quand elle suit les chorégraphies des ballerines en plein effort. S’ensuivra un corps à corps avec un père exceptionnel (pas seulement au sens propre), patriarche d’une famille d’où la figure maternelle s’avérera absente.
Tant de souffrance pour forcer la nature : mais quelle récompense !


Lara, née fille dans un corps de garçon rêve de devenir danseuse. Avec ce sujet rare le réalisateur nous fait entrer avec beaucoup de délicatesse dans le quotidien d’une adolescence singulière. Entretiens avec l’équipe médicale, scènes à l’école, gestes de tendresse entre Lara et son petit frère, échanges emplis d’attention avec le père alternent avec les cours de danse classique et leur exigence. Les pieds blessés par les pointes, Lara s’impatiente devant un corps qu’elle n’arrive pas à discipliner, et la souffrance de ses premiers émois amoureux ne nous est pas épargnée.
Dans cette famille sans figure maternelle, le père accompagne avec beaucoup de respect et d’inquiétude son enfant qui prend un chemin si difficile. Ce film tout en nuances - interrogation sur le sexe biologique, le genre, les codes du masculin et du féminin- semble nous dire que l’important pour tout être est de trouver son identité et sa singularité dans la vie comme dans la société.