Primary Menu

My Sweet Pepper Land

(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

Le Kurdistan irakien est devenu une région autonome après la mort de Saddam Hussein en 2003, c’est dire qu’il a tenu à se doter aussitôt d’un gouvernement, d’une administration et d’une police. Mais les choses ne sont jamais aussi simples. Le poids des traditions familiales, l’autorité des parents sur leurs enfants, le pouvoir des anciens seigneurs locaux et de leurs séides, sont toujours solidement en place.

Hiner Saleem décrit dans ce film ce choc de deux cultures, de deux générations, de deux conceptions politiques et morales. Il le fait avec le talent et le sens de l’humour déjà révélés par « Vodka Lemon » en 2003. Baran, un combattant de la résistance kurde à Saddam Hussein, revient d’abord dans son village, où sa mère veut le marier à son idée. Il s’enfuit très vite et devient commandant de la police dans un village perdu près de la frontière avec la Turquie. Et Golvend est l’institutrice de l’école toute neuve du village, elle a choisi d’y revenir malgré les résistances de son père et de ses six frères, Tous deux vont très vite être affrontés à la situation existante : trafics de médicaments, de drogue et de nourriture au passage de la frontière, présence des résistants kurdes venus de Turquie, domination du seigneur du village, corrompu et collabo avec l’ancien régime, à la gâchette facile, soumission aux règles claniques.

Le cinéaste sait décrire cette situation tragique avec un humour décalé, il laisse place à la naissance d’un amour indépendant des règles anciennes, et il donne au commandant Baran assez de courage et d’expérience de la guerre pour triompher à la fin. Une victoire de David contre Goliath, et une victoire de l’amour sur les servitudes, çà fait toujours plaisir à voir et cela souligne les qualités de cet excellent film, tourné dans de splendides paysages de montagne.


Plus western que ça tu meurs ! Dans les montagnes kurdes entre Iraq, Iran et Turquie un justicier solitaire fait respecter la loi face au riche caïd local et ses hommes de main. Des falaises majestueuses remplacent les rochers de Monument Valley, les gros plans de mentons mal rasés sont accompagnés d’une musique spaghettisante, et une douce institutrice vient s’ajouter aux devoirs de protection du héros... Les huit frères de la demoiselle, le trafic de médics périmés ou les chevaux mal domptés font partie du folklore de rigueur, mais les jolies terroristes kurdes triomphant kalach au poing des méchant sbires sont une addition originale. Pan ! Pan ! On s’amuse.

Le film s’ouvre en nous faisant rire avec une exécution capitale ratée, par laquelle l’autorité du Kurdistan nouvellement maître de son destin cherchait à démontrer sa volonté de droit et d’ordre - mais il y faudra encore quelques progrès en matière d’organisation et de modernisation des choses et des esprits. Tel est le sujet en arrière-plan de ce film, qui dénonce plaisamment mais efficacement une société paralysée par un traditionalisme moyenâgeux entretenu par les conservateurs installés, qui en profitent et, entre autres méfaits, sabotent l’éducation des enfants.

Père Jacques le Fur