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Les manuscrits ne brûlent pas

Un Certain Regard
Les manuscrits ne brûlent pas

Nationalité : Iranien
Genre : Drame
Durée : 2h05min
Date de sortie : Prochainement
Réalisateur : Mohammad Rasoulof
Acteurs principaux : acteurs inconnus

Khosrow est un tueur à gage. Sous l’autorité de Morteza, ils partent tous deux en mission pour un assassinat commandité. Le meurtre doit être mis en scène pour faire croire à un suicide. Les deux tueurs doivent changer leur plan initial au dernier moment...


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

Mohammad Rasoulof est un des deux cinéastes iraniens, avec le grand Jafar Panahi, condamné par le régime à la résidence surveillée et à l’interdiction de filmer. La manière dont il a pu réaliser ce film dans la clandestinité suscite l’admiration. Car nous avons ici un vrai film, avec un scénario et des personnages bien vivants. Trois écrivains sont aux prises avec les services secrets, qui veulent à tout prix s’emparer des manuscrits de leurs œuvres. Tous les procédés de pression, de violence et de chantage sont utilisés. On pense à ce qu’ont vécu Soljénytsine et d’autres dissidents au temps de l’URSS, c’est le même type de régime.

Le film s’attache surtout à suivre deux hommes de main des services secrets, les exécuteurs des basses œuvres. L’un des deux est en même temps préoccupé par la santé de son petit garçon, qui doit être opéré, mais qu’il faut conduire à l’hôpital et il faut de l’argent pour cela. Entre deux voyages en voiture, avec un écrivain à exécuter caché dans le coffre, il téléphone à sa femme pour avoir des nouvelles de son fils. Le chef des services secrets, lui-même un ancien résistant longtemps en prison, mais repenti et maintenant devenu une grosse pointure du régime, est une autre figure effrayante. Malgré tout, les manuscrits résistent. Ce film qui laisse entrevoir un courage inouï donne une idée terrifiante du régime iranien.


Beau film, mais sinistre réapparition du système d’oppression totalitaire qui nous avait valu L’Aveu ou La vie des autres, cette fois-ci dans une version ’révolution iranienne’ tellement d’actualité qu’aucun nom n’apparaît au générique après celui du réalisateur.

Le chef tortionnaire, à qui est confié le soin de faire la chasse aux intellectuels et aux idées ("Je suis fier de servir mon Dieu et mon Pays !") est doté pour cela de la plus grand entreprise éditoriale du pays, et des moyens classiques des services secrets. On le voit ici occupé à espionner, torturer et assassiner l’auteur et les détenteurs d’un manuscrit qui dénonçait une tentative de meurtre collectif, quelque temps auparavant, d’un groupe d’intellectuels et de syndicalistes. Les deux brutes qui exécutent les violences sont des personnages dotés de sentiments - l’un anxieux de la maladie de son jeune fils, et craignant même que son sale métier en soit cause par punition divine ; l’autre se donnant du mal pour réussir à faire hospitaliser le gamin - mais cela ne les empêche pas de plonger à pleines mains dans l’inhumain.

Le film est très bien construit et réalisé, mais ce qu’il raconte est tellement déplaisant que l’on est soulagé quand cela finit - mal !

Père Jacques le Fur