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17 FILLES

17 filles

Pays : Film français
Genre : Comédie dramatique
Durée : 1h30
Avec Louise Grinberg, Juliette Darche, Roxane Duran
Réalisé par Delphine et Muriel Coulin

Dans une petite ville au bord de l’océan, dix-sept adolescentes d’un même lycée prennent ensemble une décision inattendue et incompréhensible aux yeux des garçons et des adultes : elles décident de tomber enceintes en même temps. Ce film est inspiré d’un fait divers survenu en 2008.


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

Un film charmant et très frais, et pourtant pas si léger que ça. Quand 17 filles décident de « tomber » enceintes en même temps - une histoire inspirée d’un fait réel ! - cela dépasse l’accident de parcours individuel ou le simple fait divers pour former un problème social, sinon politique. D’ailleurs, les adultes en restent sans mots, ou du moins sans mots efficaces. Car pour être efficaces il faudrait déjà comprendre, et pour comprendre il faudrait remettre en question leurs propres certitudes, celles des années 1968 quand maternité et émancipation étaient contradictoires. Ces jeunes filles ont choisi de s’affranchir de la tutelle des adultes, car, curieusement, c’est le seul domaine dans lequel leur choix est protégé par la loi. A l’école, les programmes sont dictés, avec les meilleures intentions du monde ; à la maison, les adultes dictent les règles (« range ta chambre ! », phrase honnie entre toutes) ; la conduite automobile s’apprend tout juste, et elle est dite « accompagnée ». Alors que là, tout d’un coup, elles se propulsent dans la vie d’adulte. Le frère de la meneuse, soldat en Afghanistan, dit à sa soeur que tous les deux ils ont pris 10 ans, lui par ce qu’il a vu, elle par ce qu’elle a fait.
Et pourtant, malgré l’énergie de leurs seize ans, le rêve va buter sur la réalité : en cas de coup dur on appelle maman, et l’idée d’additionner leurs allocations familiale pour élever leurs enfants en commun demeure au stade de l’utopie.
Pourtant, l’interrogation demeure : comment devenir adulte, quelle vie choisir, comment arriver déjà à avoir le choix ?


Quel avenir pour les jeunes ? Voici, à la Semaine de la Critique, un film excellent, par sa réalisation, et un film important, pour son sujet. Un film féminin, puisque réalisé par deux sœurs et consacré à des jeunes filles d’un lycée de province, inspiré par des événements réels survenus en 2008. Tourné à Lorient, le film sait mettre en valeur le cadre de cette ville portuaire, les bords de l’Océan, la mélancolie qui s’en dégage. A partir d’un point de départ étonnant -plusieurs jeunes filles de 16 ans sont enceintes en même temps dans le même lycée- le film sait aborder avec délicatesse de grandes questions de notre société : qu’est-ce qui peut donner sens à la vie des jeunes, quand les parents sont si lointains ou la famille éclatée, quand règnent le chômage et l’incertitude sur l’avenir ? Avoir un enfant, voir surgir de soi-même une vie nouvelle, montrer qu’on est vraiment capable d’aimer une autre personne, dans un monde où l’amour semble disparu, noyé sous les soucis ou sous le stress : « Enfin il y aura quelqu’un que je pourrai aimer pour de bon ! » dit Camille. Beaucoup d’idéalisme de jeunesse, certes, chez toutes ces jeunes filles, mais plus profondément, une conscience que la vie est porteuse d’absolu, qu’il y a dans la transmission de la vie quelque chose d’infiniment grand : on rejoint là les valeurs, le fond éternel de toute existence humaine. Les garçons restent ici à l’arrière-plan, mais leurs difficultés face à l’avenir sont évoquées à travers le frère de Camille, devenu militaire et qui revient d’Afghanistan. Le tragique survient aussi, et donne à ce premier film une ampleur humaine attachante.