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Eyes wide open

Un Certain Regard
Einaym Pkuhot (Eyes wide open)

Film : Israël
Genre : Documentaire
Durée : 1h31min
Date de sortie : Prochainement
Avec : Zohar Strauss, Ran Danker, Ravit
Réalisation : Haim Tabakman

Aaron, un respectable boucher communauté juive ultra-orthodoxe de Jérusalem, est marié à Rivka et est un père dévoué pour ses cinq enfants. Après la mort de son père, Aaron est à la recherche d’un assistant pour le remplacer. Un jour, un jeune étudiant nommé Ezri entre la boucherie par hasard. Les deux hommes se lient d’amitié. Le lendemain, Aaron découvre que Ezri passé la nuit sur un banc dans la rue. Aaron prend pitié de Ezri et décide d’être son patron.


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

Comme dans Kadosh d’Amos Gitaï, il s’agit d’une histoire d’amour en milieu juif orthodoxe à Jérusalem. Sauf qu’ici, la problématique se corse par le fait qu’il s’agit d’une relation homosexuelle. On pouvait craindre le pire devant une telle constellation, mais la mise en scène et le jeu sensible des acteurs sonne toujours juste.
La camaraderie virile joyeuse qu’on trouve dans nos contrées plutôt dans des bistrots à l’heure du foot, se déploie ici dans le cadre de l’étude de la Torah à la yeshiva. L’homosexualité est bien désignée par la communauté comme abjection, mais l’amour, hétérosexuel celui-là, entre un homme et une jeune fille, promise par son père à un autre, est tout autant interdit - ce qui montre bien que ce qui est en jeu, c’est moins une pratique sexuelle particulière que la pression du groupe sur l’individu. Le rabbin, tout gardien de la loi qu’il soit, garde une compassion qui désespère de la faiblesse humaine plutôt qu’elle ne la condamne, alors que des jeunes têtes brulées se posent en justiciers.
L’éclosion de la relation interdite donne au boucher le sentiment de vivre - enfin. Mais comme dans Kadosh, la seule issue possible est la mort, ici de façon significative après un bain rituel. Bernard-Henri Lévy parlait de "pureté dangereuse" (Grasset 1994), dans certains contextes elle est mortifère.


Ce film nous semble à la fois très proche et très lointain.
Très proche en ce que la situation d’Aaron, le boucher, peut se rencontrer tout autour de nous : un homme marié et père de famille se découvre une attirance très forte pour quelqu’un d’autre que sa femme. Il suit son désir mais se sent vite en porte à faux par rapport à sa famille et son milieu de vie. Il est vrai qu’ici, l’objet du désir est un autre homme ce qui n’est sans doute pas le cas le plus courant dans ce genre d’aventure.
Très lointain parce que tout ceci se déroule à Jérusalem dans un quartier de juifs orthodoxes où le poids de la religion et la pression du groupe sont extrêmement forts. Il faut sans doute beaucoup d’audace au réalisateur pour situer dans cet univers là cette histoire de relation homosexuelle. Et cette histoire est scandée par des séances de prière à la synagogue, des discussions religieuses sur les textes sacrés, des références au pur et à l’impur, toutes scènes nous paraissant aux antipodes de nos mentalités actuelles "modernes" et "laïques".
Mais ce que vit Aaron est en fait universel : le conflit entre le désir et la loi, entre sa soif de vie et son respect de la règle.... Deux scènes se font le pendant pour illustrer ce conflit. La première nous montre Aaron et Ezri se retrouvant en pleine nature pour un bain rituel qui prélude à leur relation amoureuse. Ici, détente et joie. La deuxième au cours de laquelle Aaron se livre à nouveau à ce bain rituel mais, tout seul cette fois, et disparaît sous l’eau, n’apercevant pour lui aucune possibilité d’échapper à la réprobation de son groupe ni aucune possibilité de le quitter.


It must have been risky to make a film with the help of the Israel Film Commission about the untraorthodox community in Jerusalem. It must have been even more risky when the theme was homosexuality.
With only a scene at a bathing spring in the hills, the action is confined to a house, a shop, a synagogue and the streets of Jerusalem. Aaron has a butcher’s shop there. He has a wife and four children. After the death of his father, he opens the shop again and encounters Ezri, a rather sullen young man, and gives him shelter. While some momentary indications of Ezri’s sexual orientation are suggested, Aaron is affected by his presence, puzzled and, despite his attendance at synagogue and Talmud interpretation classes, he does not know what to do.
The neighbours are suspicious of Ezri, gossip about him and Aaron, the hotheads in training with the Rabbi want to declare the butcher’s shop non-kosher. Aaron’s wife is aware that something is not right.
Aaron goes with his feelings, with his eyes wide open to where he is going.
The film is respectful of Jewish prayer, bible study and Talmud. However, the screenplay raises issues of what God’s word says about sin and sexuality, how a person on the verge of sin discovers more about their real self as well as the nature of sin and guilt in the community. While the implication is that the ultraorthodox have fixed and unnuanced ideas, the film does not preach but by telling its story, delving into the feelings and crises of its characters, it asks its audience to reflect.