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Ha’Meshotet

Ha'Meshotet (Le vagabond)

Pays : Film israélien
Genre : Divers
Durée : 1h 26min
Date de sortie : prochainement
Avec Omri Fuhrer, Ali Nassar, Ronit Peled, Shani Ben-Haim
Réalisé par Avishai Sivan

Isaac, étudiant dans une yeshiva, est le fils unique de parents redevenus des religieux orthodoxes. Piégé dans une famille à problèmes et dans un corps défaillant, Isaac trouve refuge dans le vagabondage. Venant de découvrir qu’il risque d’être stérile, le jeune homme cherche des réponses dans le passé douteux de son père. En vagabondant dans les quartiers populaires de la ville, il recherche une délivrance.


(L'avis exprimé par les rédacteurs de cette rubrique est indépendant du travail et des choix du Jury oecuménique.)

La misère émotionnelle de notre société moderne est légendaire. Un argument justifiant généralement l’attrait des communautés religieuses est que celles-ci offrent à leurs adeptes une chaleur humaine palliant l’isolement affectif environnant. Ce film fait preuve du contraire. Dans une famille juive orthodoxe, qui rappelle celle de Kaddosh, le non-dit pèse lourdement sur le jeune héros, dit « le vagabond », parce que sa seule échappatoire est de marcher, arpentant la ville en long et en large. Sa sexualité s’éveille, compliquée encore par une varicocèle douloureuse et exacerbée par un sentiment de culpabilité qu’on pourrait nommer ontologique car précédant toute faute ; il est par ailleurs incité par ses parents de façon pressante à se marier alors que les candidates ne lui inspirent qu’effroi. Comme une cocotte-minute qui explose, il finit par commettre un acte odieux …
Ce premier film, tourné avec peu de moyens, laisse présager un futur intéressant pour ce réalisateur.


Un des attraits de la quinzaine des réalisateurs est d’offrir la découverte de films se présentant un peu comme des Objets Cinématographiques Non totalement Identifiés. Ha’Meshotet est un de ces OCNI 2010. Non tant par le fond : le sujet est proche de celui de My father, my Lord, à savoir la description des dégâts causés sur la personnalité d’un fils - enfant unique - par l’éducation de parents juifs ultratraditionnalistes. Qu’ici le fils s’appelle Isaac n’est évidemment pas innocent. Que, de plus, il y ait dans le passé de ce père une zone trouble et maintenue cachée, mais dont Isaac ressent l’irradiation néfaste sur son propre avenir, ne fait que renforcer le thème de base du film : les fils sont porteurs de l’histoire familiale, et "quand les pères mangent des raisins verts, les fils en ont les dents agacées".
Mais de tout cela, rien n’est dit, ou si peu. Et c’est là où l’on découvre le côté OCNI de ce film. On peut supposer que, dans son enfance de cinéaste, Avishai Sivan s’est beaucoup nourri de Bresson et d’Ozu (et, acessoirement de Buster Keaton), et les a digérés au point que, à côté de lui maintenant, nos deux minimalistes semblent des Orson Welles. Tout ici est gommé, simplifié, esquissé, limité à une épure : plans fixes, narration réduite à de brèves scènes où ce qui s’y déroule est réduit à des gestes minimaux, le reste étant laissé à l’imagination du spectateur... Mais le plus étonnant, c’est que ça marche, et qu’en quittant Isaac dont l’auteur ne nous a pas appris grand chose, on a l’impression de tout savoir de lui, de sa détresse et de son drame.